Quand j’étais enfant, je rêvais d’avoir un piano.
Vers 4 ou 5 ans, je suis tombée raide dingue amoureuse de cet instrument. J’en voulais un, pouvoir le toucher tous les jours, et apprendre à en jouer. Comme ma copine Clarisse, qui savait jouer la Lettre à Élise (ce qui était marrant : parce que nous avions aussi une copine qui s’appelait Élise).
Mais un piano, ça coutait cher. Il n’y avait plus de place au conservatoire. Alors j’ai dû faire de la clarinette. Ça n’a pas duré longtemps.
À onze ans, j’ai eu mon piano. Et j’ai appris à en jouer.
Mes rêves d’enfants, il n’y a rien de plus intense, dans le genre rêves. De ceux qui font encore trembler mes doigts et battre mon cœur très fort, lorsque j’y pense. Comme là, tout de suite, quand je me souviens de la puissance avec laquelle je rêvais de piano… Ou de chant.
Parce qu’à 8 ans, j’avais rejoint la chorale improvisée par la prof de musique de l’école, le temps d’un concert de fin d’année. Et c’est comme ça que, par un doux soir de printemps, je décidai de chanter tous les jours de ma vie, jusqu’à son bout. J’ai travaillé intensément, et longtemps : pour en faire mon métier. Et vivre de mon rêve.
Enfant, j’ai rêvé de beaucoup de choses. Devenir institutrice, pour transmettre à des êtres qui grandissent ; psychologue ou médecin, pour aider les gens. Princesse, pour porter de belles robes. Je rêvais de parler anglais comme si c’était ma langue maternelle. Je trouvais ça rigolo. Et comme je rêvais de voyager, mon bilinguisme s’avèrerait très pratique.
Mes rêves m’habitaient totalement. Ils correspondaient à la vie, la vraie, telle qu’elle méritait d’être vécue (en musique, principalement).
Et puis un jour, j’ai fait comme beaucoup de gens qui ne savent pas par où commencer pour grandir : j’ai choisi d’être raisonnable et pragmatique. J’ai fait des études respectables. J’ai appris un métier. Un vrai : de ceux qui se pratiquent depuis un bureau.
J’ai arrêté de toucher à mon piano. Et il n’a plus jamais été question d’être chanteuse. J’ai continué à chanter tous les jours, sous la douche ou dans ma cuisine. Mais la route, la précarité de la vie d’artiste n’étaient pas pour moi. Notamment parce que j’étais en train de réaliser un autre rêve qui remontait à bien plus loin encore : je suis tombée amoureuse (d’un homme) et j’ai eu des enfants (deux).
Peut-être que dans la vie, c’est « chaque rêve en son temps »…
Moi en tout cas, j’ai surtout été très raisonnable.
J’avais même un CDI dans les relations publiques. À Paris. La classe, façon vrai adulte.
Ce n’était pas du tout mon rêve de faire ce métier. Mais c’était passionnant. C’est déjà pas mal, par les temps qui courent.
Hélas, mon CDI a péri dans la fin tragique de l’agence qui m’employait.
L’heure du changement était venue pour moi. Ça tombait bien : moi et ma famille, nous étions en plein tournant. Nous quittions Paris pour le Finistère : terre de mes racines. Parce que vivre au bord de la mer : j’en avais rêvé toute ma vie.
Et j’ai créé mon entreprise de formation.
Mon métier, c’est d’accompagner les gens, dans les entreprises, face aux problèmes multiples que pose la relation humaine : pour les aider à être constructifs dans leur dialogue et donc, à mieux travailler. La transmission, l’écoute et le partage : pour prendre soin des gens et leur apporter quelque chose de bon. Comme dans mes rêves d’enfant.
Le premier vrai beau contrat que j’ai décroché en tant qu’entrepreneure, je l’ai obtenu parce que je suis bilingue. Aujourd’hui, plus de la moitié de mon chiffre d’affaires, je le réalise en travaillant en anglais. Du coup, je voyage. Un, deux autres rêves de réalisés. Et puis c’est vrai qu’être bilingue, c’est marrant. C’est comme jouer à être quelqu’un d’autre. M’enfin à une époque, ado, je rêvais d’être comédienne, alors je ne suis pas surprise d’aimer jouer à ce jeu-là.
Une fois que j’ai eu suffisamment de rêves raisonnables à cocher sur ma liste invisible de rêves en tous genres, je me suis demandé s’il était possible d’aller voir ce qui se cachait derrière tout ce qui semblait raisonnable.
Aller chercher plus loin, plus profond : plus « moi ». Là où, avant la tentation du rationnel, je laissais parler tout ce que j’étais.
Je n’ai pas été chanteuse parce que cette vie de « saltimbanque » n’était pas pour moi. Tout ça pour, plus d’une décennie plus tard, me retrouver sur les routes de France et d’Europe à ne jamais savoir de quoi demain serait fait. Payée au cachet, à compter essentiellement sur l’effet du bouche à oreille pour décrocher de nouveaux contrats. À travailler avec des groupes entiers d’inconnus. Même, j’ai le trac tout le temps.
Une vraie belle vie de saltimbanque. Mais sans le chant. Dommage.
Je me souviens bien, j’étais sous ma douche, début janvier 2016, et entre le savonnage de ma face et celui de mes aisselles (à moins que ce ne soit l’inverse), j’ai eu une épiphanie.
Mon travail, c’est la communication des gens. Or, pour communiquer avec d’autres êtres humains, comment faites-Vous ? (Outre le sms et les bouteilles à la mer, j’entends) Pour communiquer, nous utilisons principalement : notre voix.
Et paf !
Le rêve is back.
Une formation longue, certifiante et passionnante m’attend; et d’ici quelques mois : la voix sera de nouveau au centre. Le pont entre tout ce qui vient de loin, et tout ce que j’ai fait depuis.
J’ai aujourd’hui à peu près 1000 projets liés à la voix.
Mon cerveau va exploser. Mon cœur aussi. De bonheur.
J’ai construit quelque chose qui fait qu’aujourd’hui, plus encore que chanter moi-même, l’idée d’ouvrir les autres à leur propre voix m’éclate à un point que je peine à évaluer.
Souvent j’ai eu envie de vous raconter qu’être entrepreneur, pour moi, c’était choisir de mettre au monde une vie entièrement faite de ce que nous sommes.
Et tout est dans nos rêves d’enfants : ils en disent plus long que tout le reste de nos vies sur la personne que nous sommes vraiment.
Surtout que l’équation me parait ultra puissante : associez la force des rêves d’enfant à la capacité de réalisation et d’action de l’adulte, et vous avez un combo époustouflant.
Il y a quelques jours je vous parlais de la fin proche de mon année comptable. Et j’annonçais la publication ici de conseils d’entrepreneure. Finalement, ce billet n’est pas un conseil : c’est un retour d’expérience.
Et puis quand on est entrepreneur, la vie, le travail : tout ça c’est pareil, puisque c’est nous. Alors…
Quand j’étais enfant, je rêvais d’avoir un piano.
Il y a quelques semaines, j’ai rapatrié mon piano chez moi. Depuis, j’en joue tous les jours.
Avoir 4 ans, c’est sans doute la plus puissante source de force que j’aie en tant que cheffe d’entreprise. Et en tant qu’être humain en général.
PS : j’ai eu l’idée de ce billet il y a une semaine. Le lendemain, on me confirmait le sujet sur lequel je prendrai la parole lors du Summer Camp du Shift, le week end prochain, au Cap Fréhel… « Réaliser ses rêves d’entrepreneuriat »… À vous aussi, on le dit parfois, qu’il n’y a pas de hasard dans la vie ? 😉
C’est touchant les rêves de gosse. Il faut absolument les garder présents dans notre cœur afin d’y puiser, à tout moment, la force de poursuivre notre chemin. Car il faut croire en nos rêves, ils sont le ferment de notre avenir.
Très beau et passionnant ton texte, Marie. Merci.
JiPé
P.S. : à noter que « La lettre à Elise » qui a tant fait travailler la Poste, a très vraisemblablement été écrite pour une certaine … Thérèse, dont notre génial sourdingue était amoureux. (Thérèse Malfatti, fille du médecin de Beethoven).
Merci beaucoup Jipé !
Hé oui, il n’y a jamais eu d’Élise, la lettre était pour Thérèse… La musique reste aussi belle quoi qu’il arrive 😉
très beau partage Marie! je me suis déjà fait ce trip sur mes rêves d’enfant et comment, d’une certaine façon, sous une certaine forme, ils sont présents, en filigrane. Chez moi c’est l communication, la rencontre avec l’autre et la vie, découvrir… mes rêves de devenir égyptologue, comédienne, journaliste, traductrice, communicatrice, psy… ils se retrouvent. Que ce soit dans mon coaching, mon écriture et même mes missions de marketing… et la 1/20 du temps je communique en anglais.
Tu conclus à merveille « Avoir 4 ans, c’est sans doute la plus puissante source de force que j’aie en tant que cheffe d’entreprise. Et en tant qu’être humain en général. »
Quelle belle aventure la vie!
Merci Marie <3
Oui ! Merci pour ce partage Héloïse !
Quel beau texte ! Il me donne à réfléchir… Quand je suis devenue officiellement « journaliste » il y a quelques mois, je me suis amusée en me rappelant que c’était une carrière que j’avais longtemps envisagée. J’ai eu enfin l’impression d’être « à ma place ». Mais en lisant ton article, j’ai envie de me replonger dans mes autres rêves, pour voir ce que je pourrais réaliser aujourd’hui de ces rêves-là…
… Tes rêves, tes rêves… Comme un rêve de livre, par exemple ? 😉 Je suis contente pour toi : cette sensation d’être « à sa place », c’est rare finalement. Et tellement précieux !
Très beau billet qui montre bien à quel point il est important de ne pas renoncer à ses rêves, même s’ils prennent une autre forme au fil du temps !
Merci Marie. 🙂
Oui, le tout c’est de les garder là, avec soi. Après, nous pouvons exprimer leur essence de mille façons. C’est un jeu de piste parfois passionnant et très riche !
Je ne sais pas encore ou je vais mais moi aussi j’ai décidé de tout quitter (ou presque 😉 ) pour changer de vie Et je me sens cette âme d’entrepreneuse Merci de partager ton audace Cela me donne du courage Je crois a la force des rêves Ils ont un pouvoir magique 😉 Merci et très belle année a toi