L’Express Styles, moi, et ma journée du melon

En créant ce blog, je n’ai jamais réfléchi à « pourquoi ».
Je suis passée directement à la case « parce que » : simple, direct, immédiatement dans l’action.
Efficace.

Alors j’ai rédigé mes billets, fidèle à moi-même : ne suivant aucune ligne éditoriale, aucune logique, aucune continuité flagrante. Me fiant à mes envies, mes émotions, et me tenant à l’écart des modes : pour être unique au monde, quitte à n’être reconnue qu’après ma mort. En effet, ce blog, c’est un truc d’artiste incomprise, j’aime bien ça, et j’y tiens.

Et puis petit à petit, les gens y ont été de leurs commentaires. Ceux qui n’aimaient pas ce qu’ils lisaient ont eu la diligence de se taire. Les autres ont nourri mon ego à grands renforts de « quelle belle plume !» et de « ce billet est magnifique ». Déjà, ma frêle carapace d’humilité commençait à craqueler.

La première fois que quelqu’un m’a avoué avoir pleuré à la lecture d’un billet, je me suis prise pour Steinbeck.
Et à force d’en voir me dire combien je les avais fait rire, j’ai fini par m’auto-persuader que j’étais la fille cachée de Coluche et Florence Foresti.

Et puis un jour, j’ai reçu son mail. Le mail d’Anaïs, journaliste pour le site de l’Express Styles.
Anaïs m’a dit qu’elle avait aimé mon blog. M’a déballé toute une série de compliments qui m’ont rosi les joues d’une fierté authentique pendant au moins deux semaines.
Sur le moment, j’étais tellement captivée par l’intense vanité que sa flatterie générait en moi, que je suis descendue du train à Bécon au lieu de Courbevoie. La tuile.
Durant le quart d’heure passé à attendre dans le froid l’arrivée du prochain train, j’ai failli répondre : « Anaïs, n’en jetez plus : j’ai loupé mon train ».
Sauf que ça ne s’arrêtait pas là. Au terme de tous ses compliments, Anaïs m’annonçait que Marie Grain de Sel avait été choisi pour répondre à une interview suite à sa sélection en tant que…
* Là ça mérite un roulement de tambour *
« Blog stylé » du site Internet de l’Express Styles.

LE. TRUC. DE. DINGUE.

C'est là que j'ai commencé à avoir sérieusement le melon

C’est là que j’ai commencé à avoir sérieusement le melon

Je ne sais pas si c’était le fait d’avoir été lue et choisie ou le fait d’être rangée sous le qualificatif « stylé » qui m’a le plus fascinée.
Toutefois, c’est à ce moment là que j’ai craqué.

J’ai commencé avec ce texto tout en sobriété, adressé à Monsieur Grain de Sel :
« C’est la consécration ».

Le lendemain à la première heure, j’ai appelé Anaïs et lui ai lancé un très solennel :
« Honey, you had me at Bonsoir Marie ». Puis je lui ai dit que j’acceptais de répondre à l’interview avec plaisir. Et je lui ai dit merci aussi, parce que Anaïs, avec tous ses compliments, elle sait carrément parler aux femmes !

J’ai brandi mes lunettes de soleil. Tressé mes cheveux pour qu’on ne voit pas qu’ils étaient sales, et j’ai pris la pose pour le portrait qui servirait à illustrer l’interview.

Et j’ai attendu la publication. Sans rien dire. Pendant ces quelques semaines, je suis restée sereine et modeste, presque effacée.
Non je rigole : en fait,  j’avais pris la grosse tête, mais ça ne se voyait pas. Je parvenais à en garder le secret derrière une humilité de façade.

Et le grand jour est arrivé. C’était hier.
L’interview a été publiée par là bas : Marie Grain de Sel trop Stylée

Et là j’ai pété un câble, les mecs. J’ai tout lâché, c’était la fête du « blog stylé » dans ma tête.

Avant de sortir de chez moi hier matin, j’ai attrapé un couvre chef et mes lunettes de soleil : j’avais peur que l’on me reconnaisse en public et pensais ne pas savoir gérer le flux de fans surexcités. J’ai trouvé mes lunettes de soleil mais pas de chapeau. Heureusement, j’ai retrouvé la casquette Spider Man taille 2 ans du petit. Je me suis dit que ça ferait l’affaire. Et ça a marché. Chez Carrefour, avec ma casquette et mes lunettes, j’ai vu dans le regard appuyé de certains qu’ils me reconnaissaient. Mais la respectueuse distance qu’ils ont tenu à garder m’a confirmé que mon accoutrement envoyait un message clair : « Je suis une personne comme vous, j’ai le droit, moi aussi, de faire mes courses tranquillement ».

Dans la rue, un enfant a couru vers moi. La larme à l’œil, le nez crouté.
J’ai vu dans son regard l’impatience de m’atteindre et d’obtenir un souvenir précieux de cette femme qui le fascinait tant : moi. Un autographe, un bisou ?
Ce n’est pas donné à tout le monde de croiser une star : comme je comprends son empressement ! Sa mère a bien essayé de le ratraper, mais en vain.
« Laissez, mon amie, il ne me dérange pas, j’adore mes petits fans », lui ai-je articulé des lèvres dans la distance, finissant sur un clin d’œil complice (c’est vrai : avant d’être une star, je suis avant tout une mère et je me sentais proche de cette femme). Lorsqu’il fut enfin à mes pieds, l’enfant m’adressa dans un souffle haletant et chargé de postillons : « toi t’es caca boudin ! ».
Hahahaha ! Mais qu’il était beau cet enfant qui me rappelait que nous ne sommes que peu de choses ! J’ai compris sa tentative d’établir une complicité avec moi. C’est normal : moi aussi j’aimerais être si proche d’une star que, forte de notre amitié à bâtons rompus, je pourrais appeler « ma crotte sauvage » ou « gros caca boudin de babouin ». Et puis après on irait boire une bière en mangeant des chips : le bonheur simple.

Enfin hier soir, j’ai filtré mes appels. Dans ma situation, on ne peut pas se permettre de répondre à toutes les sollicitations. Tous ces gens qui veulent un bout de moi. Sentir irradier sur eux un peu de ma célébrité. Je ne peux pas gérer tout ça : je suis une épouse et une mère, en dehors des heures que je consacre à ma vie d’artiste, ne l’oublions pas.
Ceci dit, la soirée a été très calme.
Je n’ai eu qu’un appel : ma mère.
Or une star ne répond jamais elle-même au téléphone, tudieu, quelle erreur de débutante !
Comme ma célébrité ne devait durer qu’un jour, je n’ai pas pris mes dispositions et embauché une assistante. J’ai donc pris ce que j’avais à la maison et qui y ressemblait le plus : mon enfant.
Je lui ai dit : « prends l’appel et dis-lui de monnayer toute photo de mon enfance qu’elle adresserait à Michel Drucker ou Mireille Dumas. Et pour les autographes, ma réponse est oui, bien évidemment : c’est payant. Merci mon chou, ça te fera un yahourt supplémentaire pour le dessert ».

Mon assistant éphémère a pris l’appel avec un professionnalisme épatant.

« Elle dit que tu as oublié mon slip ce matin mais qu’elle l’a lavé demain soir et qu’elle te le donnera hier »*.
* Traduction : « Elle dit que tu as oublié mon slip la semaine dernière, qu’elle l’a lavé cet après midi et qu’elle te le donnera la prochaine fois » (pour mieux comprendre la notion du temps de l’enfant, c’est par ici)

Ha ma mère… j’ai reconnu là sa pudeur légendaire. Derrière cette histoire vulgaire de sous vêtement se cachait la fierté contenue d’une mère éperdue d’amour et d’admiration pour la chair de sa chair. Et au fond, comme toujours, derrière l’excuse de choses ancrées dans le quotidien, je comprenais ce que son cœur silencieux tentait de me dire avec tant d’authenticité. Comme c’était beau.

Et puis, le soir venu, la vie normale a repris son cours.
J’ai essuyé des fesses rondes et humides (et celles de mes enfants aussi au passage). Improvisé une chanson sur des pirates férus d’athlétisme et bouffeurs de pain grillé.
Pour être plus à l’aise, je me suis mise en pyjama. Comme je n’ai pas de chaussons et que le carrelage est froid, j’ai assorti mes ballerines ajourées rose pâle à mes chaussettes à rayures marrons.
Voilà, c’est ça : une « blogueuse stylée ».

Et je me suis dit que j’allais venir ici vous raconter cette drôle d’histoire.
Parce qu’un jour il y a eu une lectrice (: toi) + un lecteur (: toi) + un lecteur (: toi) + …

Et de lectrices en lecteurs, Anaïs atterrit ici et, non contente de m’offrir les compliments les plus chouettes possibles sur mon blog, me propose d’apparaître dans la sélection des blogs de l’Express Styles !

Et j’ai été sacrément contente ! Et je trouvais que ça valait le coup de venir fêter ça ici avec vous.

Je glisse ici la photo-souvenir de cet épisode trop stylé :

Maman, je suis en Une de l'Express Styles alors arrête avec tes histoires de slip !

Maman, je suis en Une de l’Express Styles alors arrête avec tes histoires de slip !

 

PS : pour trouver le site sur lequel j’ai trouvé le melon qui se pourlèche les babines à coup de jambon serrano, cliquez sur l’image ! 

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22 Comments

  1. Non mais sérieux, tu t’es tressée les cheveux comme ça toute seule??? Désolée, je fais une fixation dessus depuis que j’ai lu l’article, je pensais que t’avais eu un coiffeur, toussa 😉

    • Héééé ouais ! Je me fais mes nattes toute seule. C’est un don qu’on a de mère en fille dans la famille.
      Yen a, elles ont le secret du poulet rôti au citron… Moi j’ai le secret de la tresse. Classe.

  2. Je suis trop émue de laisser un commentaire sur le blog d’une blogueuse-star-stylée-essuyeuse de fesses.!!! Du délire, quoi! Bref, tu as compris : j’ai adOOOré ton billet…et je m’y suis reconnue 🙂 Moi, toute nouvelle blogueuse, qui a eu son blog thé à la Une de Cosmo et qui malgré son excitation n’a trouvé que des « Ouais, cool pour toi, mais kesse qu’on mange? » dans son public composé d’enfants de 2 à 10 ans. Et au fait, on n’est jamais trop stylée. Ce que tu as , c’est mieux que ça et ça s’appelle…du talent!
    PS: j’ai découvert ton blog sur Hellocoton grâce à un like de Le Blog de Malise.
    http://www.monarmoireathe.com

  3. « Stylé », c’est le mot juste.

  4. Je ne sais pas lequel de ton article ou de l’interview m’a fait le plus rire ! Merci pour ce bon moment.
    (Malin la natte, on ne voit pas du tout que tes cheveux sont crasseux) !

  5. Tu m’as donné envie de découvrir Brest 😀 on arrive pour le barbeuc !

  6. J’aime beaucoup ce ton très auto derision, ne serais tu pas un peu british sur les bords!?
    Merci pour cette belle prose et bon vent a toi blagueuse stylée.
    Alix de Miami
    http://www.blushandbeyond.net

  7. juliette

    Ouais stylée c’est le mot, avec une prose tellement agréable à lire. C’est léger mais pas trop, c’est bien! Keep up the good work Marie Grain de Sel et merci à ta famille, Coluche, Mr Bean, Florence, Steinbeck…tu es bien entourée en effet 🙂

  8. Zut alors maintenant que tu es une star – euh pardon, que vous êtes une star (non mais pour qui je me prends moi, simple mortelle, de te – ah mais zuuut, pardon, VOUS – tutoyer ?!?), vous allez prendre plus cher pour répondre aux commentaires et aux mails, non ?
    En tous cas bravo 🙂

  9. Le monde n’est pas fait pour percevoir à sa juste valeur notre infinie sagesse et recevoir notre bonté et nos conseils avisés notamment sur l’intérêt de porter du fluo en total look.

    Je préfère rester anonyme dans la rue plutôt que de devoir perturber pour la journée des gens normaux tout à coup touchés par mon aura magnifique.

    On dit merci qui ?

  10. Carrément, trop stylée! Et hop, voici ton blog dans mes favoris

  11. Je partage un point de vue avec toi : j’écris pour moi. Ce qui fait la différence entre les blogs, c’est le style, l’écriture, l’inspiration, ce dont ton blog est abondamment doté.

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