Faut-il craindre ?

La semaine dernière, quelqu’un a partagé un article, sur Facebook, intitulé : « Faut-il craindre l’Uber économie ? ».
J’aurais un plaisir colossal à discuter de « l’Uber économie » avec vous : j’adore ça moi, « l’Uber économie ».
Mais non : aujourd’hui j’ai décidé de m’intéresser à ce « Faut-il craindre ? », que je vois partout et dont les médias se gargarisent à longueurs d’années.
Pure rhétorique, cette question-là…
Que la réponse soit « oui » ou qu’elle soit « non », ce « faut-il craindre ? » ne sert à rien d’autre qu’à nous embêter. On aurait pu dire « Que faut-il penser de l’Uber économie ? ». Mais non. Ha ben non : « penser », c’est mou du genou, alors qu’avoir peur d’emblée, avant même de savoir, c’est tellement plus rock’n roll.
Quel moyen plus efficace que la peur insufflée dans les moindres recoins d’une société pour la rendre bien docile, bien mouton, bien figée ? Lorsque nous avons peur : nous n’arrivons plus à penser, et c’est là que nous enchainons les conneries. Si si.

Parfois la peur est tellement partout que je finis par me demander si je devrais avoir peur de la prochaine fois que je vais avoir peur. C’est n’importe quoi.
J’ai décidé de mener mon enquête et j’ai récolté pour vous les meilleurs « faut-il craindre ?» du Net. Puis j’ai décidé de vous proposer ici des réponses claires, simples, logiques : libératrices. Parce que ça commence à bien faire !

[Avant de poursuivre : je précise que j’ai trouvé tous ces titres d’articles en faisant une vraie recherche Google. Ici, les enquêtes sont menées avec science et rigueur; m’enfin vous le savez, vous commencez à me connaître]

Faut-il craindre la liberté
Celui-là, je l’ai trouvé énorme. Nous craignons autant la liberté, que le bonheur, que la réussite. Pourquoi ? Parce qu’on aime se faire peur. Et puis aussi, la liberté, il faut l’assumer.
Tout à coup, vous avez la permission de faire des choses et vous ne savez plus si vous êtes capables de les faire seuls (parce que vous n’aviez jamais essayé). Et puis avec la liberté vient la responsabilité : je suis libre, je suis responsable de mon destin, je dois prendre soin de moi-même tout en faisant honneur à ce grand privilège qu’est l’indépendance. Dans le réussi comme dans l’échec, c’est moi qui agit librement et en toute conscience de mes possibles, tout en respectant ceux des autres. Je l’admets : ce n’est pas rien, la liberté.
Mais au fond, « faut-il craindre la liberté ? » : pourquoi ? Si ce n’est pas ça, j’ai le choix entre quoi et quoi ? L’asservissement, l’enfermement, l’immobilisme, le silence… la souffrance ?
Bon… Est-ce un choix difficile ?
Non, ne craignons pas la liberté. Faisons-en bon usage, si nous avons la chance de l’attraper au vol. Et ça devrait bien se passer pour nous comme pour tous les autres.

Faut-il craindre le regard d’autrui ?
Je trouve cette question très intéressante. L’avènement des réseaux sociaux est une ode au regard des autres : où tout ce que nous disons et montrons sert à l’entretenir, à lui faire honneur, à en faire le miroir indispensable à nos vies.
Pour autant, faut-il craindre le regard des autres ? Je dirais que le regard des autres, au fond, ne peut rien nous faire de mal. Ma réponse est donc non : n’ayons pas peur du regard des autres.
Sauf s’il envoie des rayons lasers, de l’acide, ou du vomi. Auquel cas je vous conseillerais, avant tout, de changer de fréquentations.
Mais sinon, le regard des autres n’est pas autant à craindre que notre propre regard. Mon idée : à investir notre énergie dans notre capacité à poser un regard aimant, indulgent et plein d’humour sur nous-même, nous n’aurions plus le temps d’en avoir quoi que ce soit à faire du regard des autres. Et donc : plus rien à craindre. Facile.

Faut-il craindre les robots sexuels? 
Et là ma réponse est un gros « NON ».
Attendez avant de craindre ! « Robots sexuels »… Mais qu’est-ce que c’est que ce truc ?.. Vue comme ça, je trouve l’idée intrigante et je ne demande qu’à voir (et éventuellement, à tester) avant de dire s’il faut en avoir peur.
Personnellement, je lis « robots sexuels » et je pense « orgasmes » (au pluriel). Dans mon cerveau, le câble qui fait cette connexion n’est pas celui de la peur, bien au contraire.
Nous pourrions, bien entendu, avoir un débat sur le « faut-il avoir peur des orgasmes ? » ou « Faut-il avoir peur du sexe ? ». Et sur ce point, je vous renvoie au paragraphe sur la liberté : les bonnes choses peuvent paraître effrayantes lorsque nous n’y sommes pas habitués. Mais à remplir nos vies de choses bonnes, nous prenons vite le pli du plaisir : c’est comme le vélo, ça vient avec la pratique. Ça vaut le coup de s’y essayer, à mon avis.

« Faut-il avoir peur de l’intelligence artificielle ? »
Ma réponse est non. S’il y a une chose à craindre concernant l’intelligence, à mon avis : c’est son absence. Le reste est toujours une bonne nouvelle, du moment qu’intelligence, il y a.

« Gluten, faut-il en avoir peur ? »
Sans hésiter : non ! Le Gluten est le meilleur argument marketing de ce début de XXIè siècle. Il mérite notre admiration et notre respect.
SAUF, bien sûr : si vous êtes vraiment allergiques au Gluten (comme le sont 5% des gens qui consomment du « sans gluten »), alors là oui, faites gaffe !

« Faut-il craindre que les rats envahissent nos WC ? »
Ici, encore une fois, on dramatise tout. Pourquoi craindre que les rats envahissent nos WC ? J’ai lu ça et la première chose que j’ai pensé était : « est-ce que les rats peuvent envahir mes WC, déjà, de base ? ». Comment ? Pourquoi ? Et puis ils rentrent par où ? Par la cuvette ?
Bref… Cette question rocambolesque en soulève mille autres.
Je vais à l’essentiel et tranche directement, au moyen d’une notion simple mais redoutable : la MORT AU RAT (cf. rayon « Droguerie/Assassinat d’animaux bizarres », au fond à droite, chez Carrefour).
Alors là : c’est qui qu’a peur de qui, hein ? Ils font moins les malins, les rats de cuvettes…

J’ai ensuite trouvé un lâcher exceptionnel de craintes en cascades. Regardez, il y a même une progression toute logique :
a – Faut-il craindre le moustique tigre ?
b – Faut-il avoir peur des guêpes ?
c- Faut-il avoir peur de l’araignée violon ?
(oui… « l’araignée violon » oui…)
Et enfin, LA question qui boucle le tout :
d – Faut-il avoir peur des piqûres d’insectes ?

NB : pour cette catégorie que je trouve à part, si on vous pose la question c’est que la réponse est probablement « oui ».

« Faut-il craindre la mort ? »
Hé bien oui.
S’il est une peur légitime, c’est la peur de la mort. S’il est un drame qui nous attend tous sans exception, c’est bien celui-là.
Et en même temps, je me dis : puisque nous sommes certains que nos vies se finiront inévitablement par la mort, autant vivre bien tant que nous sommes encore vivants, non ?
Ce qui est effrayant dans la mort, c’est l’idée qu’elle ne nous laisse pas le temps de vivre notre vie.
La réponse que je propose est donc : non, ne craignons pas la mort (puisqu’elle arrive, de toute manière), et vivons notre vie de plein fouet, histoire de ne pas perdre le temps qu’il nous reste.

« Faut-il craindre le vaccin contre la méningite ? »
Hé bien pour ma part, je crains la méningite, surtout.

« Faut-il avoir peur de Dieu ? »
Comme nous ne sommes pas au Moyen Âge, je pense que nous avons le recul suffisant pour affirmer que non : la colère divine ne s’abattra pas sur nous sous forme d’orage, de séisme ou d’éclipse lunaire, pour nous punir de nos pêchers.
Pourquoi craindre Dieu ? Aucun acte malveillant de sa part n’est à déplorer depuis au moins 2500 ans : cela nous permet d’écarter toute peur irrationnelle.
Craignons, par contre, le culte de Dieu. Car l’idée de Dieu aurait pu rassembler l’humanité : à considérer qu’il nous ait tous créés, chaque être humain serait donc, symboliquement, le frère ou la sœur de son voisin. Belle idée. Sauf que… La religion, si elle n’est pas maniée avec le plus grand soin, sert à construire et à accentuer les clivages : merveilleuse excuse, la religion, pour pointer du doigt, pour dire que nous sommes différents, que nous ne faisons pas pareil et donc, que nous ne sommes bien entendu pas faits pour nous entendre. Et je ne parle pas des religions des autres, ça serait trop facile, justement. Je parle de la mienne, la religion catholique, au non de laquelle on s’autorise toutes les intolérances et les mesquineries, j’ai remarqué. Je n’ai rien contre les religions, bien au contraire : il se passe des choses merveilleuses au sein des religions et avec les religions entre elles. Des choses dont on parle peu, malheureusement. Pour le reste, je crois qu’il faut s’en méfier comme de bombes à retardement qui n’ont de cesse de nous exploser à la figure.
Donc, je crois que non : n’ayons pas peur de Dieu, il s’en fiche.
Du coup, à la question « Faut-il avoir peur du Diable ? » également repérée sur le web : nous pouvons également passer notre chemin car (scoop) le « Diable » n’existe pas.

« Faut-il avoir peur de l’eau du robinet ? »
Euh… Faut-il avoir peur de la pelouse verte ?
Sérieusement… Attention à l’abus de la notion de « peur » : parfois, c’est très exagéré, tout de même. On parle d’eau du robinet : avouez qu’à côté de l’araignée violon, c’est peu de chose. Alors relax, les amis. RE. LAX.
Ma réponse est donc : non.
Si l’eau du robinet est potable : même pas peur.
Si elle ne l’est pas -> Volvic.

Dans la catégorie internationale, j’ai eu :
Faut-il avoir peur de la Chine ?
Faut-il avoir peur de l’Amérique ?
Faut-il avoir peur de Vladimir Poutine?

Ma réponse : oui, oui, et oui. Il est important d’identifier un ennemi, venu de loin, et que nous connaissons peu, voire très mal, de préférence. Comme ça, quand tout va mal dans la vie : ça nous fait quelqu’un à accuser (c’est TOUJOURS de la faute des américains de toute manière : si mon grand-père était encore vivant il vous le dirait, et pas avec le sourire !).
Mais non, je vous fait une blague ! Bien sûr que non, ce n’est pas la peine d’avoir peur de ces trois-là ! Pour moi, le monde est un marché économique géant. Étant moi-même à la tête d’une entreprise, j’en suis revenue de cette histoire de concurrence et « d’ennemis » : plus vous passez de temps à regarder craintivement ce que font les voisins, moins vous en consacrez à construire quelque chose de valable chez vous ! Ce n’est pas en restant focalisés sur la Chine que nous allons évoluer. Par contre, en se concentrant sur l’innovation chez nous (et il y en a, j’ai été vérifier), là oui, nous allons peut-être arriver à quelque chose. Alors ça suffit la peur : bougeons !

« Faut-il avoir peur des objets connectés ? »
Imaginez, vous êtes en 3567 avant Jésus Christ, et je vous demande : « faut-il avoir peur de la roue ? ».
Ou alors, on dit qu’on est en 1412 et je vous demande : « faut-il avoir peur de la machine à imprimer ? ».
Aujourd’hui, à la question « Faut-il avoir peur des objets connectés ? », il est humain de répondre « oui » (et assurément, le Diable habite l’objet connecté… Cf. « Faut-il avoir peur de Dieu/ du Diable ? » et « Faut-il avoir peur du robot sexuel ? »). Et puis dans 10 ans*, nous répondrons : « ben c’était comment la vie sans les objets connectés, en fait ? ».
Voilà.
(*NB : au XXIe siècle, 10 ans d’évolution technologique équivalent à 730 ans de progrès poussifs, au Moyen âge)

« Coupe du monde de Rugby : Faut-il craindre pour les bleus ? »
Tout est relatif. Si vous avez répondu « oui » à « Faut-il craindre l’eau du Robinet ? » je pense que perdre la coupe du monde de rugby pourrait être une idée extrêmement effrayante pour vous.
À part ça, il s’agit de sport. Le sport c’est beau, c’est intense, c’est vibrant. Il est souvent associé à la catégorie « loisirs » : c’est un indice intéressant. Peut-être pourrions-nous en profiter pour passer un bon moment et oublier, pour une fois : d’avoir peur de tout dans la vie. Ma réponse concernant le Mondial tient en 3 mots clés : pizza-bière-rugby. Pas de place pour la peur dans ce programme, n’est-ce pas ?
Et puis faut-il craindre que les Bleus perdent ?… Hé bien non. Car ils ont l’habitude, et voyez : ils survivent et continuent de jouer au rugby années après années (ce qui est tout le principe de l’opération, notez).

À la question « Faut-il craindre ? », je répondrai donc globalement : « non ».
Je me souviens de cette règle universelle et ultra géniale, apprise sur les bancs du cours de journalisme : trois thématiques sont vendeuses dans les médias. Ni plus, ni moins.
Quelles sont-elles ?
La mort (ha oui ? Ho c’est original dites donc !).
La peur (ben voyons, j’aurais pas deviné).
Le sexe (hin hin hin. Celui-là je l’aime bien).
Pour la mort et la peur c’est réglé : nous avons peur de tout parce que nous nous savons mortels. Point. Grâce à ce billet, nous saurons que ce n’est pas la peine d’avoir aussi peur, finalement (pour les piqures de guêpes : approchez la chair meurtrie et douloureuse d’une source de chaleur, ça fait évacuer le venin) (j’ai marché sur une guêpe il y a 3 semaines).
Nous pouvons donc passer au suivant : le SEXE. Chouette.
Je mènerai mon enquête sur ce sujet et vous ferai part de mes conclusions le plus vite possible (en général quand je dis ça, je m’absente 3 mois mais bon… tout vient à point blablabla, vous savez…).

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18 Comments

  1. Faut-il craindre de mourir de rire dès potron-minet (bon ok 9h36, c’est pas non plus l’aube) à cause d’une fille qui s’appelle Marie, qui habite en Bretagne et qui vit littéralement dans la tête d’une autre fille, qui s’appelle Morgane et vit à Lyon ?
    Oui. IL FAUT. TU DOIS.
    Sinon, comme disait ma grand-mère : « la peur n’évite pas le danger ».
    Auquel je rajoute : « la peur amplifie le danger, voire en crée de nouveaux ».
    MAIS, parce que je suis une fille, donc paradoxale par nature (cliché sexiste), je dirai aussi que celui/celle qui n’a jamais peur se met en danger. Donc la peur est utile. Ce qui est inutile c’est le blocage lié à la peur, pas la peur en elle-même.
    Bref, le mot de la fin à Machine des Bronzés font du ski :
    « J’y vais mais j’ai peur ! »
    Mais, elle y va.
    Chapeau bas 😀
    Bisous (faut-il craindre l’herpès virtuel ?)
    Morgane

    • Marie Grain de Sel

      Faut-il craindre de faire des bisous ? Faudra que j’y réfléchisse 😉 J’adore la peur, personnellement : sans elle, qu’est-ce que je ferais de mes journées, je te le demande ?!!! Merci en tout cas ! Contente que nous ayons ri ensemble !

  2. C’est bon… même très bon, comme toujours 🙂

  3. LN

    Vivement le prochain billet alors 😉

  4. Bernard

    Ils ont inventé un nouveau : la peur par principe de précaution . Heureusement qu’ils ne l’avaient pas inventé du temps de la roue ; de la vapeur ; du temps de Marie Curie . Excellent billet

  5. Ahhh, j’adore !!! Comme toujours (bon presque toujours, ne tombons pas dans la flagornerie) ce billet m’évoque une foule de pensées personnelles. Mais comme les miennes sont bien moins organisées, j’en ai peur (oups, facile …), j’ai pris un immense plaisir à rire en lisant les tiennes, et rire sur la peur, excellent quand même ! Et cela rejoint mon aversion pour tout article qui commence par « faut-il avoir peur de … »

  6. Mardge

    D’accord avec LN, j’ai hâte au prochain, mais j’ai peur que tu mettes 3 mois ou + à le rédiger, à tester, à re-tester pour être absolument certaine de ce que tu avances….

    • Marie Grain de Sel

      Hé bien oui : tu connais mon sens de l’analyse scientifique… je ne peux avancer aucun propos sans avoir vérifié 3 (ou 50) fois, avant. Pour être sûre.

  7. http://plus.franceculture.fr/faut-il-avoir-peur-de-la-mer … aujourd’hui sur France Culture, je n’ai pas eu le courage d’écouter 😉

  8. Emilie

    Ça fait très (trop) longtemps que je n’étais pas passée par ici, tiens. J’ai relu ton excellent billet sur l’entreprenariat. Et ce billet sur la peur, ma foi, il est bien vu ! 🙂

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