Mes 30 ans sur le pas de la porte

Je vais avoir 30 ans. Dans presque 6 mois.

… J’accorde 5 secondes à mon lectorat bienveillant pour digérer cette nouvelle totalement défrisante …

(oui, je parle de « lectorat » : j’ai presque 30 et je suis mégalo.C’est mon problème)

Si tu as eu un jour une pièce de ce genre en poche, c’est que toi aussi, tu es vieux

Avec mes amis, avant, nous faisions des dîners desquels nous ne sortions jamais sobres, jamais avant minuit. Maintenant, on ne se voit que pour déjeuner ou goûter (stratégie de rencontre établie en fonction des heures de siestes/repas des enfants) et nous passons des heures à parler de maîtresses (d’école hein… quoi que…), de jouets, et du nouveau nom de la Fnac Eveil et Jeux auquel personne n’arrive à se faire.
Les seules occasions que nous avons de nous lâcher sont les mariages et encore : nous commençons déjà à parler de ceux qui, autour de nous, annoncent leurs divorces…

Avant avec mes copines, on parlait de mecs, de ciné, de sorties, de fringues. Maintenant on parle de crèmes pour crevasses d’allaitement, d’écharpes de portage, et du tarif horaire outrageux des baby-sitters…

Pour moi, ce n’est pas vraiment un problème, parce que j’ai fait ma crise de la trentaine à 28 ans (à l’école déjà, je faisais toujours mes devoirs en avance pour être tranquille, je l’ai déjà dit : je suis une lèche-bottes de première catégorie). J’ai traversé une phase où mon âge grandissant, ma vingtaine s’éloignant à pas de géants et ma jeunesse envolée ont soulevé certaines angoisses.

J’ai détesté la dizaine : la puberté, ça n’était vraiment pas mon truc et je garde avant tout de ces dix années un sentiment profond de mal être, de haine flagrante dirigée à l’égard de moi-même et d’une absence totale de compréhension de qui j’étais.

La vingtaine a été tellement fabuleuse et remplie que j’en ai la tête qui tourne rien que d’y penser. Le grand amour, le diplôme, le premier boulot, le mariage, les enfants, la carrière qui prenait vraiment forme. Résultat : je suis arrivée à 28 ans, avec mes 30 ans en ligne de mire et l’impression que le meilleur était déjà fait. Avec la peur du vide. La crainte de ne plus pouvoir me projeter, de n’avoir rien de mieux à construire. D’avoir vécu le plus beau et donc, de devoir m’armer pour une décadence qui était forcément la suite logique à tout ça.

C’est surprenant parce que lorsque j’avais 15 ans et que j’étais une adolescente tout à fait normale (paumée, sans confiance en rien et surtout pas en moi-même), je lisais souvent des interviews de mes idoles qui passaient la trentaine. Je me souviens encore de Sophie Marceau qui affirmait qu’elle se sentait tellement mieux dans sa peau à 30 ans qu’à 20 ans. Elles disaient toutes ça, même ma mère ! J’avais fini par avancer dans la vie en étant persuadée que la trentaine était l’âge d’or de la femme. Qu’à cet âge-là, on sort la tête haute de la vingtaine : décennie durant laquelle les bases d’un avenir prometteur ont été sagement posées. J’avais fini par intégrer totalement l’idée que 30 ans (et toute la dizaine qui suivrait) serait un âge vraiment fabuleux. Et comme tout le monde autour de moi a déjà passé le cap, j’étais la petite emmerdeuse qui disait tout le temps : «ho mais t’as de la chaaaance ! 30 ans c’est le nouveau 20 ans !» (petite conne ! Vas prendre ton train en 12-25 ans et fous-nous la paix! ).
Il faut dire aussi que mon principal modèle était (et le restera toujours, d’ailleurs) ma mère, qui m’avait montré l’exemple d’une femme magnifique, ambitieuse, forte, ayant toujours su trouver sa place dans la vie professionnelle tout en restant une épouse et une maman très présente.
Et puis soudain, à 28 ans, je devenais ce modèle, et je ne m’y retrouvais pas. Comme ma mère, j’étais mariée, j’avais deux enfants ou presque (j’étais en pleine gestation), j’avais du succès dans les affaires (oui, comme dans Starmania). J’étais donc vieille (d’ailleurs, quand on fait référence à Starmania c’est vraiment qu’on vient d’un temps que les moins de 20 ans ne peuvent pas connaître… et quand on fait référence à Charles Aznavour… bref…).

Je ne savais pas si je pouvais espérer d’aussi belles choses de la décennie à venir. En un mot : j’ai flippé ma race.
Ce couplet d’une chanson que je fredonne à mon fils tous les soirs me hantait comme s’il avait été écrit exprès pour m’embêter :

Depuis ça, le temps a passé,
Il ne reste plus qu’un doux souvenir
Quand j’y pense, mon coeur est brisé,
Tout ici, comme cela doit finir

(non mais je vous vois venir : en fait c’est une très jolie chanson d’amour, et non pas un hymne au suicide par injection de chocolat chaud dans l’oeil).

Et puis, comme dans cette chanson, justement, le temps a passé.
Ce n’est pas mon bonheur de jeune femme qui n’est qu’un lointain souvenir, mais cette crise de la vingt huitaine.
Mes 30 ans, je les sens là : au pas de ma porte. Et dans ma tête, c’est la fête (enfin pas comme le jour où j’aurais VRAIMENT 30 ans parce que là pour le coup je vais tout faire péter comme une grosse cinglée).
Comme Sophie Marceau (on est tellement pareilles elle et moi, finalement), je me sens mieux à 30 ans qu’à 20 ans. Je sais qui je suis mieux que personne et mieux que jamais. Je ne sais absolument pas où je vais, mais je sais que je vais quelque part.
Et un milliard de fois mieux : je suis la femme que je rêvais d’être à 15 ans, quand ma meilleure amie (qui l’est toujours…On dira ce qu’on voudra mais au moins je suis fidèle) m’avait demandé où je me voyais à 30 ans (au passage, ça me fait sourire parce qu’à l’époque ça me paraissait tellement loin). J’avais répondu un truc bien nunuche et bien dans mon style qui devait ressembler à : «à 30 ans, je me vois accompagnée de l’homme de ma vie et maman d’un, deux, trois enfants… qui sait?». Oui, c’était ça mon rêve …
Alors certes, il y en a qui se voyaient sauter en chute libre depuis l’espace et moi j’avais des ambitions très terre à terre, finalement.
Mais quand j’y pense aujourd’hui j’en chialerais rien que de réaliser que j’ai donné à cette jeune fille de 15 ans (qui a elle aussi beaucoup pleuré) tout ce dont elle rêvait.

Aujourd’hui je me dis vraiment que 30 ans c’est le nouveau 20 ans; mais en mieux.

Ce nombre, plus je le vois, plus j’y pense, plus il me plait. Plus je m’y plais. Je suis prête.

1983 Powa les mecs !

Et je me prépare à faire ma crise de la quarantaine à 35 ans…

Mais dans l’ensemble, l’humeur est à la fête.

PS : cette jolie petite phrase aurait pu être la conclusion parfaite pour ce billet. Mais finalement je vais juste rajouter qu’il me reste 6 mois avant d’avoir 30 ans et que, donc, je vais vraiment bassiner tout le monde avec ça, y compris sur ce blog. D’ailleurs, je crée une catégorie, qui va vite devenir la plus fournie… Voilà.

 

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9 Comments

  1. J’aime vraiment ton style, tu as gagné au moins un lecteur fidèle dans ton lectorat (tant que tu continues comme ça, hein, si tu parles politique, je me barre :-). Bon, et sinon, à 40 ans, les enfants y sont grands, on peut recommencer à fréquenter ceux de 20 ans et faire la fête jusqu’au bout de la nuit, car on a plus besoin de se lever. Bon, par contre, pour récupérer, c’est un peu plus long 🙂

  2. Ha merde tu me fous la pression : moi qui préparait un billet sur JL Mélanchon et A. Montebourg (parce qu’il parait qu’ils ont une liaison… mais chuuut!).
    Ha ok : 40 ans c’est LE nouveau 20 ans en fait 😉
    Merci beaucoup, au passage 😉

  3. Mimo

    J’aime beaucoup cet article.
    Perso j’étais toujours était à la bourre si bien que j’ai fait ma crise d’adolescence à 30 ans….
    J’ai maintenant dépassé (très légèrement d’une année….) la quarantaine et je me demande quelle crise je vais bien pouvoir faire 😉

  4. Ton article est très bien écrit et décrit tout en nuances tout ce qui peut nous passer par la tête à l’approche de la trentaine, depuis la période « j’ai flippé ma race » à « aujourd’hui je me dis vraiment que 30 ans c’est le nouveau 20 ans; mais en mieux »…
    C’est un cheminement, c’est sûr, mais l’équilibre reste fragile entre ces deux sentiments… c’est pour cela que j’ai eu envie d’y consacrer mon blog (et de bassiner tout le monde avec ça, comme tu le dis si bien ^^).

    • Merci ! Et ton blog m’inspire de A à Z (tu penses !). Tu as bien fait d’en faire un blog, c’est rigolo ! Et puis bassiner tout le monde avec ça, ça veut dire aussi rappeler constamment à tes proches que la date cruciale approche et qu’il ne faudrait pas qu’ils oublient de t’offrir un cadeau ENORME qui déchire tout 😉

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