Je n’ai jamais aussi peu écrit ici que dans l’année qui vient de s’écouler.
Souvent, je n’y pense même pas.
La vie, c’est une occupation à plein temps, vous savez. Et m’arrêter au milieu de tout ça pour écrire me semble parfois presque… vain.
Difficile de décider quelles parties attraper pour prendre le recul de billets qui font l’histoire parallèle. Pour raconter en drôle ou en différent.
J’en ai parlé autour de moi : ça me tracasse tout de même. Écrire me manque sans me manquer, ça me fait bizarre. On m’a dit que je n’avais qu’à écrire ça.
Ça quoi ?
Ça : ma vie, la vie. Comment c’est quand on fait ce que je fais comme je le fais et qu’on le vit de manière si complètement vivante qu’on n’a plus le temps de l’écrire.
Pas con.
On peut tout raconter et ne rien raconter non plus, sur ce que c’est, la vie, lorsqu’on crée une entreprise, lorsqu’on part, lorsqu’on ose plein de choses risquées, ou pas tant que ça, mais ultra passionnantes.
J’en ai dit beaucoup ici, mais en réalité il s’en passe dix fois plus que ce que je ne peux écrire. La vie va vite, à être belle comme ça.
Quand j’y pense, c’est une poignée de mots qui me vient à l’esprit : un glossaire émergé de ce quotidien qui tourbillonne autant qu’il file doux. Une bande de concepts qui me serviraient à raconter presque tout, ou du moins le principal, sur ce que c’est, pour moi, d’être entrepreneuse.
Je vous les propose ici, avec le secret espoir que peut-être, vous aussi aurez des mots à ajouter à ma liste. Ça, ce serait très chouette.
1/ La peur
Le cerveau humain est fait pour avoir peur : à l’origine, c’est ce qui nous permet de réagir face au danger et de nous protéger. Pour survivre. Et faire des enfants. Pour perpétrer la race.
Aujourd’hui, je crois que nous pouvons saluer l’efficacité de ce système.
Avoir peur face à ce qui nous laisse impuissants, d’accord. C’étaient les tigres avec des canines de 3m5 il y a 3000 ans. Aujourd’hui, j’ai peu de chance de tomber sur un tigre.
La seule chose qui me laisse vraiment totalement impuissante est la mort.
Pour tout le reste, globalement, je peux agir. Il faut parfois faire des choix difficiles, mais tant que je suis encore là : je peux agir et donc, contourner ou dégommer ce qui me fait peur.
Ce que vos peurs vous apprennent de plus précieux dans l’entrepreneuriat, c’est que vous êtes plus costauds qu’elles : puisque vous n’avez plus d’autres choix que les dépasser. Pour gagner en confiance en soi, je n’ai pas trouvé mieux.
2/ Les limites
S’il est un moment où vous ne pouvez plus ignorer, vos limites, c’est lorsque vous vous lancez dans l’entrepreneuriat. Il y a vos réelles limites : vous ne savez ni ne pouvez tout faire, et c’est le bon moment pour vous en rendre compte. Et agir en fonction de ça : rien n’est impossible, vous compenserez vos limites par les forces que vous avez ailleurs. Et tout ira bien comme ça.
Il y a aussi les limites-mensonges : celles que vous avez posées là, ou que l’on vous a appris à poser alors qu’elles n’ont pas lieu d’être.
Vous savez très bien vivre avec, et même : elles vous rassurent. Sauf que vous avez en tête de viser plus haut, maintenant que la patronne, le patron, c’est vous.
En effet, les limites-mensonges ont cette particularité agaçante : elles vous limitent.
Dans l’entrepreneuriat, comme il faut bien avancer, comme il faut bien aller au-delà de ces limites pour pouvoir manger et payer son loyer : on tente des sauts. Juste pour voir ce qui se passe de l’autre côté de la limite.
Non seulement on en découvre avec surprise que la limite était un mensonge ; mais en plus, on se découvre bien plus capable, bien plus intéressant qu’on ne l’avait imaginé.
Ainsi, vous re dessinez à ciel ouvert les contours des réussites que vous décidez pour vous-mêmes. Pour gagner en estime de soi, je n’ai pas trouvé mieux.
« Votre élasticité dans le rebond, votre réactivité à tout : là réside cette merveille que vous allez vous dévoiler pour vous-même jour après jour et qu’on appelle la puissance. »
3/ L’élasticité
Entrepreneurs, vous monterez très haut, vous retomberez très bas. Parfois dans la même semaine. Parfois dans la même heure.
Le plus surprenant dans tout ça ne sera pas d’avoir survécu aux extrêmes.
La surprise de l’entrepreneuriat, c’est que vous vous relèverez, le lendemain matin, encore plus sûrs, et très souvent : bien plus forts.
Votre élasticité dans le rebond, votre réactivité à tout : là réside cette merveille que vous allez vous dévoiler pour vous-même jour après jour et qu’on appelle la puissance.
Cette puissance, qui dépassera ce que vous n’aviez jamais osé envisager d’elle, vous concernant, ne se mesurera pas à la façon dont vous serez capables de faire face à toutes vos chutes, grandes ou petites : elle se manifestera à la force et la détermination avec lesquelles vous redécollerez 10, 100, 1000 fois. Toujours.
La particularité de l’élastique est qu’on a beau tirer dessus, il ne casse pas. Il s’étire, revient à sa forme de départ, s’étire encore davantage s’il le faut. L’élastique est bien plus fort qu’il n’y paraît. Et vous aussi. C’est votre entrepreneuriat qui vous l’apprendra.
4/ L’Humanité
Dans l’entrepreneuriat, on est donc très humain : peurs, limites, coups durs. Un peu plus chaque jour, vous serez confrontés à vos failles, à vos forces, à tout ce que vous êtes capables d’accomplir.
100 fois par jour, vous lèverez le voile sur toutes les complexités qu’induit votre qualité d’être humain. Votre imperfection de fait. Votre perfectibilité de nature.
Et à chaque réussite, vous saurez d’où vous venez. Vous saurez que rien n’était gagné, et que rien ne le sera jamais vraiment. Que tout ça est basé sur vous : un humain aussi fragile que solide ; aussi faible que puissant.
Vous serez humain, en brut comme en polissé.
Vous apprendrez à être moins modestes, pour devenir plus humbles.
5/ L’Humour
Dans l’entrepreneuriat, je recommande d’apprendre à rire, et même de se réjouir de davantage de choses. Mon conseil est, et restera toujours : fêtez ça. Tout ce que vous pouvez. Rien que de se lever chaque lundi matin et d’y croire encore, ça se fête.
À côté de ça, rire sera votre salut. Riez de vous, riez des situations les plus improbables (et il y en aura, CROYEZ-MOI).
Avec indulgence, avec bienveillance : riez beaucoup.
Parce que si c’était pour faire la gueule, vous auriez pu rester travailler 45 heures par semaines (ou 35, ou 70) pour des patrons que vous ne pouvez pas sentir, dans des entreprises où vous vous faites profondément chier.
6/ Le Détachement
Tout ceci m’amène logiquement au détachement : vous mesurerez la qualité de votre courbe de réussite personnelle à la croissance exponentielle de votre détachement.
En d’autres termes : dans l’entrepreneuriat, vous apprendrez à faire fi des broutilles et de ce qui ne sert à rien d’autre qu’à vous faire perdre de l’énergie (ou passer des nuits blanches). Certaines relations, certains contrats, certaines réalités du métier, les Urssaf…
De plus en plus, vous serez concentrés sur l’essentiel : le sens que vous mettez, vous, dans tout ça.
Le détachement vous allègera, et ménagera davantage de place pour ce que vous avez de puissant et d’efficace.
D’année en année, je me contrefiche d’une quantité croissante de choses et d’évènements du quotidien. En d’autres termes : je suis de plus en plus libre. Et de plus en plus fraiche.
Le détachement, c’est davantage de liberté d’être vous avec votre ton et votre unicité : c’est extrêmement grisant. Et addictif.
7/ L’Echec
J’ai l’impression que tout le monde crée son entreprise en y pensant, à l’échec. En réalité, j’ai l’impression que tout le monde pense tout le temps à l’éventualité de l’échec, quel que soit le type de vie que l’on mène.
Longtemps, j’ai donc trouvé qu’il était normal de penser à l’échec, de le tenir à une distance vigilante, toujours dans mon champs de vision : au cas où il me tomberait dessus sans prévenir.
Aujourd’hui, l’échec est le genre de salade que je n’avale plus.
Mais alors plus du tout.
Et en écrivant ceci je pense avec émotion à tous ces entrepreneurs que je fréquente de près, que je porte dans mon cœur, et à toutes ces fois où chacun de nous s’est trouvé sur le pas de cette porte que tout le monde redoute : la fin, la chute. L’échec.
Un projet pourra échouer. Une entreprise peut toujours s’éteindre.
Mais tant que je serai là, vivante, capable : l’échec n’existera pas pour moi.
Si ce n’est pas cette entreprise-ci, ç’en sera une autre. Si ce n’est pas ce projet, ce sera le suivant. Mais tant que je pourrai, je ferai. Et tant que je fais, à mon avis : je suis en train de réussir.
Je ne connais que deux échecs possibles, en tant qu’entrepreneuse : revenir au salariat, et la mort (qui en effet, serait un frein considérable à mon envie d’agir).
Donc tant que je serai en train d’entreprendre, je ne serai jamais dans l’échec. Mieux, je serai donc dans ma réussite.
« Il faut beaucoup d’amour pour entreprendre. D’ailleurs, ça se voit tout de suite lorsque quelqu’un entreprend sans amour. Et ça ne donne pas envie. »
8/ L’Amour
Je crois que je n’avais jamais vécu autant d’amour.
L’entrepreneuriat, c’est aimer un métier au point de tout miser dessus.
C’est aimer votre travail au point de le prendre à votre compte pour le représenter vous-même entièrement. Et en devenir le boss.
C’est aimer des gens suffisamment pour vous associer à eux et remettre un bout de votre destin entre leurs mains aussi hésitantes que les vôtres : vous serrer, et vous re-serrer les coudes chaque jour, face à tout, face à tous. Pour construire ce que vous croyez juste et bon.
C’est aimer l’humain au point de vous lever chaque matin pour lui proposer ce qui pourrait améliorer son monde.
C’est croire en ce monde au point de penser que vous pouvez vous retrousser les manches et y contribuer de manière positive… et que cela aura un impact et un sens.
C’est aimer vos enfants et essayer de risquer beaucoup, pour réussir et le partager avec eux. Pour réussir et qu’ils puissent un jour tout oser à leur tour.
Enfin, entreprendre c’est vous aimer suffisamment pour penser que vous serez la clé de votre réussite. Que ce travail-là, avec ces gens-là, dans ce monde-ci : vous pourrez le faire bien, et de mieux en mieux.
Et vous apprendrez à vous aimer encore davantage, à mesure que vous avancerez, et que vous bâtirez ce bout d’univers qui fonctionne à travers vous.
Il faut beaucoup d’amour pour entreprendre. D’ailleurs, ça se voit tout de suite lorsque quelqu’un entreprend sans amour. Et ça ne donne pas envie.
9/ La Magie
La magie, dans l’entrepreneuriat, c’est qu’il va se passer tout ça pour vous. Par alternance ou tout à la fois. Et tous les jours.
Et vous, vous avez d’autres mots pour raconter cette vie ?
La fidélité : fidélité à son être profond, à ses rêves, à ses choix, à soi-même, aux autres (ceux qu’on a choisis, of course), à ses fragilités comme à ses puissances, à la justesse, à la cohérence, à ses principes même s’ils évoluent 🙂
Et à ses clients, même les pourris qui nous apprennent plein de choses AH AH. Car oui, dire non, c’est aussi une forme de fidélité
Ha mais carrément ! Comment n’y ai-je pas pensé !
La fidélité, complètement, je suis d’accord avec tout ce que tu as dit. Des choses très précieuses à savoir et à rappeler.
Merci Morgane !
Comme c’est bon de te relire à nouveau ! ça me redonne la pêche tout ça…
Chouette ! Il faut que je continue alors 😉
Le PLAISIR
Si j’ai entrepris, c’est pour faire ce que j’aime, le faire chaque jour avec plaisir. A noter que ça évolue… Avec le temps, mon activité se transforme pour rester dans ce que j’aime faire, dans ce que j’aime proposer aux autres car je pense que ça peut leur apporter quelque chose. Mais chaque jour, j’ai du plaisir dans mon job!
Oui tu as tellement raison ! Le PLAISIR ! Je devrais refaire un billet avec vos suggestions : elles sont top (et indispensables) 😉 Merci !